Décrite en 1971 par le professeur Feldman, l’inhibition résiduelle est un phénomène de réduction temporaire de l’acouphène qui survient spontanément après que l’on ait exposé le patient à un bruit correspondant au spectre audiométrique de l’acouphène. L’application Diapason, développée par la société Immersive Therapy, permettra de déclencher ce phénomène d’inhibition résiduelle sur commande. Avec une mise sur le marché prévue pour janvier 2019, cette application offrira la possibilité à toute personne acouphénique munie d’un smartphone ou d’un tablette de s’entraîner de manière agréable et ludique à contrôler l’intensité et la présence de ses acouphènes. Nous avons pu échanger avec Paul-Emile Fauquet, Psychologue cognitif chez Immersive Therapy, qui nous livre ici plusieurs précieux éclairages qui permettent de mieux comprendre comment fonctionne l’inhibition résiduelle.
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Qu’est ce que l’inhibition résiduelle ?
C’est ainsi que lors des essais réalisés par Immersive Therapy dans le cadre du développement de l’application Diapason, une majorité de participants ont pu témoigner d’une réduction partielle s’étalant sur quelques secondes ou quelques minutes et 2 personnes ont même rapporté une diminution dont les effets se sont fait sentir sur plusieurs heures.
Comment l’application Diapason parvient-elle à déclencher ce phénomène d’inhibition résiduelle ?
Un système d’impulsions acoustiques personnalisées
Le volume du son émis doit être légèrement supérieur (de l’ordre de 10 décibels) à l’intensité des acouphènes. La période d’impulsions acoustiques se déroule sur une minute et contient des séquences sonores ainsi que de courtes pauses silencieuses. Le bruit thérapeutique correspondant à la fréquence de l’acouphène est diffusé durant 3 secondes, chaque séquence étant entrecoupée par 1 seconde de silence. Après seulement 1 minute de cette stimulation, on peut déjà observer le phénomène d’inhibition résiduelle à l’oeuvre.
Au delà de la disparition totale ou partielle des symptômes sur une période plus ou moins longue selon les personnes, il n’est pas inutile de mentionner les effets positifs qu’apporte l’inhibition résiduelle sur le plan psychologique. En effet, le fait de pouvoir ainsi « débrayer » l’acouphène durant quelques secondes, minutes ou heures est un formidable moyen d’insuffler de l’espoir et du soulagement auprès des femmes et hommes qui souffrent au quotidien de la présence en continue de leurs symptômes acouphéniques.
Un procédé qui produit des effets sur (presque) tous les types d’acouphènes
Ce qu’il est ici intéressant de constater, c’est que l’inhibition résiduelle participe à diminuer ce que l’on nomme la saillance acouphénique. Ce terme désigne le pouvoir d’occuper le champ de conscience. Un indice de saillance faible signifiera que l’acouphène surgit assez discrètement dans le champ de conscience tandis qu’un indice de saillance élevé indiquera que l’acouphène tend à s’imposer de manière intrusive dans notre esprit, nos pensées et notre conscience.
Une augmentation temporaire de l’acouphène dans environ 3% des cas (phénomène rare)
C’est pour cette raison que l’application Diapason permet d’évaluer en amont les effets de l’inhibition résiduelle sur l’utilisateur, ceci afin de minimiser les risques.
Une action sur le système nerveux central qui modifie la perception des symptômes acouphéniques
Au sein de ce SNC, on retrouve le précunéus. Les études semblent indiquer que celui-ci est hypo-activé (insuffisamment actif) chez les personnes présentant des acouphènes en lien avec un déficit de l’audition. Or il apparaîtrait que l’inhibition résiduelle entraîne un regain d’activité au niveau du précunéus. Cela pourrait expliquer pourquoi les symptômes acouphéniques tendent à diminuer voire, à disparaître durant un moment, lorsque le phénomène se déclenche.
Le rôle clé du réseau du mode par défaut
Le fait que le MPD soit faiblement activé, notamment en cas d’acouphènes liés à une perte auditive, pourrait laisser supposer que l’acouphène est traité par le cerveau comme un son venant de l’extérieur et non comme un phénomène interne. L’intérêt de l’inhibition résiduelle viendrait donc ici de sa capacité à ramener temporairement le cerveau à un état de repos proche de celui induit par le MDP.
Les méthodes traditionnelles d’inhibition résiduelle
Le problème réel des bruits blancs est celui pointé dans le début de l’article : ils ne sont pas spécifiquement centrés sur l’acouphène, et donc perdent en efficacité car stimulent trop largement le centre auditif. L’Inhibition résiduelle est toujours plus efficace et plus rapide lorsqu’elle est centrée sur le spectre auditif de l’acouphène.
Les innovations proposées par l’application Diapason
L’utilisation d’un bruit « à bande étroite »
Ce protocole innovant est un axe développé récemment dans la recherche. La conclusion est que l’inhibition résiduelle est grandement favorisée si l’on segmente le son grâce à de petites coupures. Cette approche moderne a été testé de manière informatisée avec utilisation d’un casque audio.
Une acouphénométrie pour calibrer l’application en fonction de la fréquence et la bande passante de son acouphène
L’apport du ludique dans le thérapeutique
Dans le cadre de l’application Diapason et de l’inhibition résiduelle visant à réduire les symptômes acouphéniques, le fait de rendre le parcours thérapeutique plus ludique incite l’utilisateur à être actif plutôt que simplement passif. Le jeu, ici baptisé « garde la forme », permet d’associer au traitement un sentiment positif et constructif. Il s’agit par ailleurs d’une technique régulièrement utilisée en Thérapie Cognitivo-Comportementale (TCC).
Les autres axes de traitement complémentaires inclus dans l’application Diapason
Outre les activités visant à favoriser l’inhibition résiduelle, l’application Diapason utilise conjointement d’autres « principes actifs » tels que :
▶ La thérapie sonore : il s’agit de la diffusion au niveau de l’oreille d’un bruit à bande étroite non segmenté, c’est à dire diffusé durant 5 minutes. A noter que certaines activités proposées par l’application permettent à l’utilisateur à aller au delà en termes de durée.
▶ Diminution de la connotation aversive : un acouphène possédant une connotation aversive élevée va engendrer des émotions négatives à son encontre lesquelles consolident et ancrent plus profondément encore la perception des symptômes acouphéniques. Il s’agit là d’un phénomène classique qui agit comme une spirale négative. A l’inverse, un acouphène possédant une faible connotation aversive va avoir tendance à s’estomper progressivement. C’est ce même phénomène qui est à l’oeuvre dans le processus d’habituation.
C’est pour briser la spirale négative et ainsi diminuer la connotation aversive que l’application Diapason propose un ensemble d’activités qui influencent la perception psychologique que l’on a de l’acouphène. Par exemple, l’activité nommée « recette perdue » permet d’utiliser les symptômes acouphéniques comme des alliés qui vont aider à la résolution positive du jeu. Cette technique est également largement inspirée des Thérapies Cognitivo-Comportementales.
▶ Relaxation : l’application propose des techniques simples qui permettent de se relaxer et de diminuer à la fois les tensions musculaires et les crispations psychologiques toxiques qui alimentent le stress et l’anxiété, deux états émotionnels qui jouent un rôle clé dans l’intensité acouphénique.
▶ Evaluations : l’application propose des questionnaires qui permettent d’établir des diagnostic visant à apprécier l’évolution des progrès réalisés. A noter que ces questionnaires scientifiques ont été largement utilisés par les médecins ORL.
L’inhibition résiduelle, un outil de gestion de crise acouphénique
Pour favoriser l’endormissement, il sera conseillé de privilégier l’utilisation de la thérapie sonore (5min ou plus) et de coupler celle-ci avec une ou plusieurs activités de relaxation.